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"Femme loire" en touraine, l'Eglise contre une statue

23 Décembre 2010 , Rédigé par CC Publié dans #Nudité-Pudeur en Europe

La région de Tours, peut-être parce qu'elle est très imprégnée de catholicisme, a fait parler d'elle à deux reprises en 4 mois dans les grands médias sur la question du dévêtissement des corps. Une première fois dans le cadre de manifestations contre les retraites à Tours, et ce mois ci en ce qui concerne la "Femme Loire". Un artiste propose d'ériger une immense statue païenne à deux pas du monastère de Marmoutier. Certains reportages comme celui de TV Tours ci dessous parviennent bizarrement à occulter le fait que la nudité est un élément important de la polémique. Pourtant l'argument revient souvent.

 

Ce projet est un "marqueur d'identité" a déclaré l'élu municipal de Tours en charge du dossier M. Lavillatte. Dans la compétition des territoires il faut des signes quasiment publicitaires qui se voient de très haut, en avion. Une des formes du néo-paganisme, un équivalent de la vieille Artémis d'Ephèse aux multiples mammelles qui suitaient du lait.

 

 

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Le shivaïsme chez Michel Onfray

22 Décembre 2010 , Rédigé par CC Publié dans #Shivaïsme yoga tantrisme, #Philosophie, #Anthropologie du corps

Avant de retourner au shivaïsme de Daniélou synthétisons la façon dont Onfray synthétise le sujet (j'en ai parlé déjà il y  deux ou trois ans sur ce blog.

  onfray.jpg

Dans son Souci des plaisirs, Onfray aborde le shivaïsme après une condamnation de l'érotisme de Bataille qu'il juge morbide. Son intérêt pour le shivaïsme et l'Asie lui serait venue du temple de Khajurâho dont la photo trônait en couverture de l'édition chez 10-18 de L'Erotisme. Pour Onfray Khajurâho est un anti-Vézelay (haut lieu de l'ordre de Cluny où Bataille est enterré).

Suivons pas à pas les paragraphes d'Onfray. Che lui, je l'ai déjà dit, je trouve beaucoup d'approximations énervantes. Quand Onfray parle de "la pratique inchangée du culture shivaïte depuis dix mille ans" je ne le crois pas. Pas plus que je ne crois à son hypothèse selon laquelle le "point rouge" des hindous "ornait probablement (sic) le front des gymnosophistes qui ont généré la pensée grecque avant Socrate" (p. 123 - gloups! ). Parce que les gymnosophistes sont les sages indiens qui auraient initié Pyrrhon d'Elis ne sont cités qu'à l'époque hellénistique, Pyrrhon lui-même si je me souviens bien fut un soldat d'Alexandre et c'est à ce moment là qu'eut lieu la grande Rencontre Orient-Occident qui allait donner l'art du Gandhara, les grands royaumes grecs bouddhistes de Bactriane etc. Mais même si on suit MacEvilley sur les influences indiennes sur l'Inde et réciproquement à l'époque classique, celui-ci est très loin d'affirmer que des sages hindous aient pu "former" des présocratiques. Encore moins qu'on ait pu à ce moment là les qualifier de "gymnosophistes". Veut-il, lorsqu'il se réfère aux "soixante siècles avant les pyramides" se référer aux premiers indo-européens qui formeraient le substrat commun aux Grecs et aux indiens Aryens ? Mais alors au nom de quoi dire qu'il y avait parmi eux des "gymnosophistes", et comment savoir qu'ils avaient déjà adopté le "point rouge" ? Tout cela ressemble à un petit rêve de professeur de collège qui extrapole un délire à partir de deux ou trois notions "point rouge" "gymnosophistes" "pyramides" qu'il a vaguement croisées dans ses livres.

Onfray "déduit" de la forme architecturale de Khajurâho que "derrière la multiplicité des dieux du panthéon indien se trouve toujours Shiva", puis se livre sur deux pages à une apologie des gros seins et des hanches généreuses des figures féminines du temple (pour les opposer systématiquement aux corps "tristes" de l'iconographie chrétienne). Puis quand il en vient aux scènes de zoophilie et au rire des touristes devant elles (il pense que les touristes n'y voient que l'aporie solipsiste de la sexualité masculine), Onfray quitte la solitude (sollipsiste elle aussi) de ses déductions pour faire un détour par un regard tiers, celui du "spécialiste mondial du tantrisme" (p. 129) qu'il a rencontré en compagnie d'une équipe de reporters espagnols qu'il connaissait. Le philosophe repose à ce "gourou" de vouloir "verrouiller" toute interprétation possible à partir d'une connaissance ésotérique de la symbolique tantrique que seul ce spécialiste aurait (mais Onfray reconnaît quand même que le spécialiste a écrit un livre là dessus, ce qui n'est donc pas si ésotérique).

Onfray ne citera pas son nom. Son texte va viser avant tout à discréditer l'interprétation du gourou. Dans un premier temps (p. 130) il va s'attacher à montrer que le tantrisme n'est pas ce qu'on croit. Que ce mot peut s'appliquer à toute "pratique métaphysique - corporelle - dans laquelle les exercices spirituels permettent la transmission ésotérique". Il pense donc à partir de là que le tantrisme remontait aux Dravidiens avant l'invasion aryenne de l'Inde (en soulignant à nouveau que leur shivaïsme fut en fait le père de l'hindouisme, du bouddhisme... et de la philosophie grecque ! of course). Ensuite c'est finalement la scène zoophile qui va lu permettre de s'éloigner définitivement de l'interprétation du spécialiste, le "gourou" ayant eu un peu rapidement tendance à expliquer la zoophilie uniquement par le "réalisme" de la scène qui montre des soldats en campagne confrontés à la pénurie de femmes (p. 133).

A partir de là, le philosophe va reprendre cette scène de zoophilie pour affirmer que l'homme en pénétrant la jument reproduit le geste fécondant de Shiva, puis développe une apologie du shivaïsme comme refus de la rupture du continuum entre hommes et animaux qu'instaure le christianisme. Du coup dans le holisme shivaïque se  réconcilieraient "les parties de la nature dans une grande Unité spinoziste" (p. 139), ce qu'Onfray va encore retrouver dans la conception du corps en Inde où le dualisme n'existerait pas, une conception qu'il va s'empresser en quelques phrases rapides (qui tiennent plus du slogan que de la démonstration) à rapprocher du "conatus" de Spinoza, de la volonté de Schopenhauer (pas très enthousiaste pour la sexualité pourtant) et des "machines désirantes" de Deleuze... pour enchaîner sur le Kamasûtra (sans démontrer non plus quel continuum existe réellement entre le shivaïsme et cette oeuvre, autrement que par une hypothétique prégnance de Shiva dans toute la pensée indienne).

Voilà l'état du dossier en ce qui concerne Onfray. Je reviendrai sur tout cela prochainement.

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Enquêter : de quel droit ? Menaces sur l’enquête en sciences sociales Coordonné par Sylvain Laurens - Frédéric Neyrat

8 Décembre 2010 , Rédigé par CC Publié dans #Sociologie des institutions

Encore un signe de la mauvaise santé des sciences sociales, ce livre : "Enquêter : de quel droit ?". Non seulement les seuls sociologues qui intéressent la société - ou plutôt sa vitrine officielle : les médias - sont ceux qui répètent les préjugés les plus répandus, mais ce seront aussi bientôt des sociologues qui n'auront guère enquêté... car le droit d'enquête est de plus en plus limité...

  saintanselme.jpg

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Enquêter : de quel droit ?
Menaces sur l’enquête en sciences sociales

Coordonné par Sylvain Laurens - Frédéric Neyrat
Éditions Le Croquant
2010

 

4ème de couverture :


Face aux normes éthiques et aux règles juridiques qui régissent la vie privée ou la propriété intellectuelle, les sociologues, et plus largement tous les chercheurs en sciences sociales, se voient de plus en plus souvent opposés les droits des personnes enquêtées ou d’autres principes supérieurs, jusqu’à voir parfois la réalisation de leur enquête ou sa publication menacées.


Cet ouvrage a pour objet ces tensions entre droit à l’enquête et droits des enquêtés, ce croisement conflictuel entre la légitimité scientifique et différents registres possibles de mise en suspens du droit à l’enquête. Il a pour ambition de créer un espace de confrontation et d’échanges sur des expériences d’enquêtes passées qui ont pu être limitées voire interrompues par la volonté des enquêtés ou des autorités. Il est aussi l’occasion de faire le point sur les droits que peuvent faire valoir les chercheurs en sciences sociales mais aussi sur leurs devoirs face à une judiciarisation croissante des rapports sociaux qui pourraient menacer à terme leur autonomie.


Verra-t-on bientôt en France, comme cela peut être déjà le cas dans certaines universités américaines, des chercheurs faire signer à leurs enquêtés des questionnaires attestant du caractère « non violent » des questions posées ? A l’inverse, le bricolage et les arrangements sur mesure dont s’accommodent généralement les chercheurs peuvent-ils garantir le fonctionnement pérenne d’une recherche en sciences sociales sur le long terme ?

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