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Désir et politique dans les Mémoires du Cardinal de Retz

13 Septembre 2013 , Rédigé par CC Publié dans #Anthropologie du corps

Il y a un passage (p. 386 en Folio) étonnant dans les Mémoires du Cardinal de Retz, où l'on voit la logique des alliances politiques sous la Fronde potentiellement absorbée en totalité par la loi du désir sexuel. C'est cette page (qui évoque décembre 1649) où Mme de Montbazon, épouse du duc Hercule de Rohan et maîtresse du duc de Beaufort (une très belle femme très imbue de sa personne selon Retz), qui, à l'époque a 39 ans (Retz en a 36), reproche au Cardinal de ne pas s'enfuir avec elle à Péronne (Picardie), et interprète le refus de ce dernier la suivre par son propre attachement à ses deux maîtresses (ses deux "nymphes"), Mme de Chevreuse (qui a 27 ans, fille du duc de Lorraine, belle, amatrice de coucheries sans lendemain et "sotte jusques au ridicule par son naturel") et Mme de Guéméné (45 ans, épouse de son cousin Louis de Rohan). Il est étonnant de voir comme l'histoire pulsionnelle par moments se révèle sans fard...

 

retz

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Interviewé sur Le Mouv' (Radio France)

11 Septembre 2013 , Rédigé par CC Publié dans #Interviews en rapport avec mon livre "La nudité"

1-re-de-couverture-la-nudit-.gifJe serai interviewé sur la nudité en direct dans le cadre de l'émission de Giulia Foïs, "Point G comme Giulia" sur le Mouv' (une des stations de Radio France) mardi 24 septembre 2013 de 19h30 à 20h30./// PS :   JE PRECISE QUE CONTRAIREMENT A CE QU A VOULU  FAIRE CROIRE L' ANIMATRICE A L' ANTENNE NOUS N'ETIONS PAS NUS AU MICRO !

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"Pourquoi nous aimons ?" de Helen Fisher

8 Septembre 2013 , Rédigé par CC Publié dans #Notes de lecture

Je suis depuis quinze ans un fidèle de Helen Fisher. La psychologie évolutionniste me convainc par son attachement à l'universalisme, et sa vocation à relier les sciences humaines aux sciences naturelles. J'ai été un inconditionnel de son "Histoire naturelle de l'amour" (Robert Laffont 1994), "AnatomY of love" en version originale, qui interrogeait la monogamie de l'être humain, l'adultère, les rapports de force entre les sexes, les rapports de parentalité, l'évolution de l'anatomie.
 
Je me suis plongé il y a peu dans son "Pourquoi nous aimons" ("Why we love") de 2006 qui approfondit "de l'intérieur" le processus amoureux. A partir d'un typologie des caractéristiques de l'amour obtenue à partir de questionnaires établis sur la base d'une littérature puisée dans diverses civilisations, qui met en évidence une "essence universelle" de l'état amoureux autour de notions comme l'exclusivisme sexuel, l'obsession affective, la nervosité, l'attachement en dépit de l'adversité etc, elle identifie (comme Darwin) des séquences amoureuses chez les animaux (les éléphants, les renards roux, les castors etc) qui présentent de fortes congruences avec cette typologie comportementale (quoique sur des durées plus courts que chez l'homme, pouvant aller de quelques secondes à quelques semaines avec un partenaire unique trié sur le volet).
 
La comparaison "homo sapiens"/autres espèces animales permet à Helen Fisher de cerner nos spécificités. Avec la plupart des autres espèces nous partageons une propension au coup de foudre, qui nous fait gagner du temps et de l'énergie pour la procréation. En revanche, elle estime que l'odorat ne joue presque aucun rôle car nos origines dans les arbres nous disposaient plutot à la sensibilité visuelle (même si l'odeur joue ensuite dans le renforcement de la relation). L'exclusivisme, l'obsession, l'endurance dans l'attachement réciproque (ou dans le dépit) sont communs au règne animal.
 
Fisher a fait l'hypothèse que cela résultait d'une combinaison de dopamine, de noradrénaline et d'une carence en sérotonine (à l'origine de l'obsession). En 2000 l'équipe de Bartels et Zeki à Londres avec un IRMf avait mis au jour chez des couples amoureux depuis deux ou trois ans une surcharge en dopamine dans le noyau caudé (qui anticipe les récompenses, ce qui induit l'idée que l'amour est une motivation et non une émotion comme la colère ou la joie), ce que confirme l'expérience de Fisher à New York sur des amoureux récents, et une activité du cortex cingulaire antérieur et du cortex insulaire qui reste plus inactif ce qui évoque une gestion différente des émotions sans qu'on sache bien de quelle manière (p. 87).
 
Le désir comme quête de la gratification sexuelle (orientée vers plusieurs partenaires potentiels), et l'attachement comme sensation de sécurité. Le premier, qui, comme l'ingestion de nourriture, accélère le pouls et réchauffe le corps, résulte d'une montée de la testostérone et d'autres hormones sexuelles mâles. Dans l'état amoureux, la montée de testostérone résulte de la production de dopamine et de noradrénaline. L'amour provoque du désir, l'inverse peut être occasionnellement vrai. L'attachement s'installe sous l'influence de l'ocytocine et de la vasopressine (à l'origine de la monogamie du campagnol). Vasopressine et ocytocine parfois engendrent une production de testostérone, parfois c'est la réciproque qui se réalise selon des équilibres complexes. La dopamine peut stimuler la production de vasopressine et d'ocytocine mais à l'inverse ces dernières peuvent neutraliser la dopamine engendrant à la longue la lassitude sexuelle dans le couple (qui a son utilité pour empêcher l'épuisement biologique). John Alan Lee repère six catégories d'amour, et l'amour entre en écho avec des "émotions cognitives supérieures" (Dylan Evans) : le respect, l'admiration, la loyauté, la nostalgie, l'équité etc.

Les mâles sont très sensibles au stimulus visuel, à la douceur de la peau (à cause des oestrogènes), et sont génétiquement disposés à vouloir aider voire sauver la femme aimée.La femme aime les hommes intelligents, au statut supérieur, fiables. Même si la charte amoureuse ensuite subit des nuances en fonction de la situation personnelle (le passé familial etc).
 
La monogamie est apparue sans doute quand l'homme a marché au sol et s'est redressé (la position verticale permet de lancer des pierres aux fauves, mais les femmes ont été débordées avec lesmains encombrées, ne pouvaient porter leur progéniture, et sont devenues dépendantes des mâles). Des traces d'un gène à l'origine de la production de vasopressine a été retrouvé dans l'ADN de Toumaï.(on continuera ce compte-rendu un peu plus tard).
 
 
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